Pas vraiment ma première nav puisque j'ai déjà fait plusieurs vols locaux en limite de TMA (20 nautiques ici, et pas 15 comme dans le reste du monde... ), mais là il s'agit de tracer à 75 NM donc... obligation d'un dépôt de plan de vol en VFR (oui là aussi, ça ressemble plus à IVAO qu'au reste du monde... ). En plus il n'y a finalement qu'un petite dizaine d'aéroports contrôlés à Madagascar, ce qui veut dire qu'on va déposer un plan de vol pour l'aller et...rien pour le retour !
Le vol est préparé la veille, une première fois avec carte, règle, papier crayon, log de nav...puis on passe au GPS ( un Garmin 296 fraichement arrivé à l'école ) qui va être malgré tout le principal instrument de contrôle de la nav vu que le compas magnétique de l'ulm est fortement atteint de débilité (je sais ça s'appelle de la dérive...). Enfin de retour chez moi, je refais la prépa en utilisant "Navigation" de Foufou, et c'est vraiment pas mal parce que tout le monde est d'accord !
Pas de difficultés particulières pour ce vol, il n'y a pratiquement pas de classes d'espaces à Mada, quelques zones restreintes (enfin...carrément interdites, le survol de l'agglomération, celui du palais présidentiel assorti d'une zone d'interdiction hum....assez large) par contre il n'y a aucun contrôle radar donc il faut s'attendre à des demandes d'estimées pressantes et répétitives de la part de "Tana control" donc la zone s'étend sur 60 NM autour de FMMI.
Pas de grosse fiesta donc le soir du 31 (de toute façon ça je zappe systématiquement depuis 10 ans... ) et debout de bonne heure (de très bonne heure en fait, j'ai pas fait la fête mais d'autres s'en sont chargés, et sous mes fenêtres...) pour aller prendre la météo, remplir et déposer le plan de vol (une heure avant...snif !) et la prévol.
Tiens en passant au chapitre des trucs pas trop "sympas" ici (y'en a plein, j'ai pas fini de me plaindre...), le vol IFR est désormais interdit aux monomoteurs, y'a plein de C 206 et autres Pipers de compagnies privées à vendre ces jours-ci ! Non pas que je me sente directement concerné mais c'est une restriction aéronautique de plus...
On remplit les réservoirs à ras (presque 80 litres pour une capacité annoncée de 70), à deux plus le paquet de gateau et la bouteille d'eau on emplaffonne allègrement la masse maxi autorisée d'un ulm, choses assez courante dans la catégorie il faut le reconnaitre.
Check et démarrage (immédiat, sans soucis) du rotax, on peut se moquer (ou pas !) des ulm mais côté motorisation, c'est vraiment un régal, ça démarre au quart de tour, en tout cas ce 912 récent ne m'angoisse franchement pas. Ca toussote pas pendant 30 secondes et ça ne crache pas un gros nuage de fumée au démarrage ! (ça c'est pour quelques cessna du parc, je ne parle pas de l'AN-2 qui demande un brassage à la manivelle de 45 minutes avant le premier vol pour remonter l'huile dans tous les cylindres...il a l'excuse du grand age !)
Décollage de la 29 depuis la "centrale", il fait déjà chaud et je sens le poids un peu plus simportant que d'habitude mais ça grimpe bien quand même. Virage à gauche pour suivre notre route, verticale D7 puis le village-ville-bourgade (?) d'Imeritsiatosika où il faut éviter d'être trop bas pour pas se manger une antenne de telecom gigantesque mais très fine et pas toujours facile à repérer. La branche "aller" se fera au FL 065 de toute façon, qui permettra de passer partout à condition de pas trop s'écarter de la route.
On survole le circuit de karting et visiblement il y a des vélleités d'extension, un second circuit est en route, à moins que ce ne soit une piste de cross.
Ensuite cap sur Ambatolampy, ville artisanale connue pour ses fondeurs d'aluminium qui fabrique les cocottes pour cuire le "vary" (le riz en malgache), aluminium qu'ils trouvent dans les fils électriques en haut des poteaux électriques et aussi de temps en temps en essayant de cambrioler l'atelier de menuiserie aluminium (ou ceux des concurrents) dont je m'occupe à temps partiel (et ils y arrivent...)
On s'écarte un peu de la route pour rechercher une piste privée en herbe qui devrait être une sympathique destination future, près d'une briquetterie appartenant à la famille "Murat". Un plan d'eau couleur turquoise est bien visible, c'est leur piscine "naturelle", ça fait très tropical, non ?
On reprend la route pour la dernière branche en direction d' Antsirabe (FMME), en laissant à notre droite le massif de l'Ankaratra, et je profite un max, alternant pilotage, photos, manipulation du GPS, c'est pas vraiment l'endroit mais profitons d'être en instruction ! Tout seul par contre pour l'instant, je ne me vois pas encore piloter et refaire mes estimés, l'appareil est stable à condition de l'aider... Ceci-dit faut voir, avec un peu plus de place disponible.
Par prudence je recontacte Tana contrôle 10 miles avant la sortie de zone, je sais que la radio ne vas plus passer très longtemps. Pas de traffic prévu sur notre route en vue de notre atterrissage...ni pour notre décollage ! Ca c'est marrant, on n'a pas dit à quel moment on pense repartir... Bon le reste doit se faire en auto-info et on pourra toujours se renseigner sur place.
Là aussi la route directe est abandonnée au profit d'un cheminement qu'il est utile pour moi de connaitre, on s'écarte du tracé prévu et rentrons dans la vallée en suivant donc la route, le chemin de fer et la rivière.
En s'approchant de la ville on survole le complexe industriel Tiko, fondé par l'actuel Président de Madagascar, et qui occupe une surface plus qu'honorable.
La piste est facile à trouver, trop facile même ! Nous avons eu le renseignement de travaux en cours mais sans plus de précision et là, surprise, ce qui s'offre à nous est une piste de 2500 m x 40 m en terre, certes, mais prête à être goudronnée ! La taille du tarmac lui aussi soulève l'étonnement...
En tout cas c'est pas encore aujourd'hui que je vais me frotter à une piste courte et étroite, nous jouons le jeu et passons en vent arrière pour le QFU préferentiel (23) à l'atterrissage dû à la présence d'arbre au seuil de la 05 ( même si vu la longueur de la piste on pourrait se poser au 3/4). Posé nickel cette fois, mais trop court, il va falloir rouler un sacré bout maintenant !
La temérature au sol nous rattrape très vite, heureusement nous sommes équipés ! Nous sommes arrivés avec 2 minutes de retard sur le log, malgré quelques petits détours, pas mal pour un voyage de 1h20 ! Mais non, la chance et un peu de vent surtout, le GPS nous a régulièrement afficher un 65 kt sol , légèrement supérieur à nos 70-75 Mph indiqués.
Comme attendu, l'aérodrome est désert, quasi fantomatique vu la taille des surfaces. Mais non, un "vahaza" arrive, suivi d'un malgache tenant un petit carnet. Le second est un "gardien" chargé de noter les mouvements, on va peut être recevoir une taxe d'atterrissage d'ici quelques mois ?!?
Le second est un ulmiste pendulaire, qui nous emmène voir un triste hangar où végètent plus ou moins quelques machines... dans un coin, un gyro à l'agonie, le dernier vol c'est soldé par un feu moteur parait-il....ça fait pas envie (surtout là où est placé le siège passager !)
Le nom de "l'aérogare" est plus qu'évocateur, et j'imagine l'ambiance qu'ont du connaître ces lieux en d'autres temps. Il faut savoir que chaque ville d'importance moyenne a eu aux heures de gloire son aéroclub, avec des dizaines d'avions, et le week end c'était pas Druker à la télé, c'était meetings et pique-niques...
Un Cheyenne et un Commanche, propriété de Cotona (l'ancien propriétaire du terrain en fait) sont traquillement rangé dans un hangar, peut être pas pour longtemps.
La pose terminée, on repart non sans avoir rejaugé l'essence. Ca ne colle pas trop, même avec l'impreçision du jaugeage, il en manque ! Une trace jaunâtre sur l' aile nous donne l'explication, on a fait involontairement du "fuel jettison", bouchon pas étanche ! Il en reste largement pour repartir, tant mieux parce que sans bidons et avec la première pompe à 10 km, bof bof...
Décollage dans le bon sens sur la 05 (à l'arrivée pas moyen de voir la manche, planquée parmi les engins de TP stationnés pour les travaux. Et pourtant il y en a deux !)
La prochaine fois, le lieu risque d'être méconnaissable, goudronné, tour de contrôle et fréquence radio et ....plans de vols retour ! Ceci dit la situation actuelle est quelque peu incongrue, on décolle de Tana avec un plan de vol pour la première étape mais ensuite on peut très bien traverser quasiment tout Madagascar en long en large et en travers en échappant à tout contrôle...
Le retour sera direct en montée,à condition de...monter justement, pour passer la crête de la colline bordant la vallée, on prend quelques pompes bienvenue, le vario affiche parfois 850, sympa !
Les cumulus sont installés, pas très haut au dessus semble-t-il, mais derrière ça devient plus gris... la saison des pluies n'est pas loin, il va falloir oublier les vols l'après-midi... Les ascendances nous amènent à flirter avec le niveau 080, un peu au dessus des 75 réglementaires mais en ulm, l'énergie ne se refuse pas quand c'est possible !
Contact repris avec le contrôle, pas trop l'habitude mais Marcel m'indique la procédure radio: "Tango Alpha Romeo, décollé de Fox Mike Mike Echo à 08 13, en route au 360 au niveau 075 ,à destination Ivato, entrée estimée TMA 20 nautiques par le sud est à 09 09".... ça ressemble plutôt à autre chose non ?
Tana control nous rappelle s'il en est les consignes d'approche (les zones à éviter), mieux vaut les respecter, il n'y a pas de radar mais d'autres ont des jumelles... et nous bascule sur la tour ( nous sommes encore à plus de 25 NM !).
Là aussi je cafouille, je sais pas trop quoi leur dire à la tour moi pour l'instant ! Mise au point de l'instructeur: "Ben faut tout leur redire !"
- ha !
Et c'est reparti pour un tour...
-" La 29, QNH 1017, rappelez en vent arrière main gauche ! "
Eh bé ! perdent pas de temps... j'ai envie de demander si je suis numéro un !
Sauf qu'à l'arrivée ça se gâte sérieusement ! On s'annonce donc en vent arrière mais vu le trafic à la radio j' anticipe déjà l'attente, ça ne loupe pas, un avion au roulage, un autre qui demande un départ contre QFU, ça cause en français, en anglais, ça cause beaucoup, ça envoie du "break break" à tour de bras et le tarmac est "chargé"... pas bon.
Je rappelle en fin d'attente mais visiblement je l'ai fait trop courte, "stand by !", et c'est reparti pour un tour, et même plusieurs ! J'essaie de capter toutes les conversations radios et les indicatifs mais c'est pas si simple... ça semble s'éclaircir et je retente ma chance au moment ou une arrivée IFR s'annonce en longue finale. Il est encore très loin et je suis à nouveau en fin de vent arrière, bien placé pour y aller mais le contrôleur n'est visiblement pas du même avis... damned, encore raté !
Le plus "grand" building de tout Madagascar en construction ! On continue à tourner tout en surveillant quand c'est possible l'appareil en finale, il se pose puis fait un demi tour pour rejoindre la bretelle "whisky"...
Je rappelle, et la tour me répond "rappelez en finale et garder le visuel sur le traffic sur la piste." Bon, on y va, je passe en descente, le boeing est proche de dégager la piste, j'annonce "finale 29".
La tour "gardez le visuel sur le traffic", juste après j'entend un "runway vacated" mais j'ai pas capté d'indicatif, y'a un truc que je pige pas...
On n'est pas vraiment pas loin du seuil maintenant, je ne suis toujours pas "autorisé" et surtout la situation m'échappe un peu trop à mon goût...
Et là d'un seul coup je vois qu'il y a un second appareil sur la piste, un petit monomoteur qui m'a totalement échappé visuellement (j'étais concentré sur le boeing, l'autre est très petit sur cette grande piste de là où nous sommes) et surtout je ne l'ai pas entendu, je ne sais même pas au moment où je le vois enfin s'il est au décollage ou s'il vient d'atterrir derrière l'autre, mais la seconde hypothèse n'est vraiment pas très plausible.
Il a surement remonté la piste depuis la centrâle en accéléré après le posé du liner, je ne vois que ça...
Bref il décolle et on se pose mais n'en reste pas moins que j'ai loupé quelque chose à un moment donné, même si contrairement à l'habitude, on n'a eu aucune info traffic...ça devait un peu fumer à la tour...
Ceci mis à part (mais je me dis que je vais essayer de venir passer du temps au sol collé à la radio quand ça s'agite un peu...), ce fut un régal, la découverte (enfin) d'un nouveau terrain... de nouvelles envies qui naissent... bref une année qui commence bien !
3h22 de plus d'un seul coup, dommage cette attente de plus d'une demi-heure à l'arrivée, va falloir être plus fin que ça la prochaine fois et calculer le timing d'arrivée en fonction des horaires...